VIOLENCES A KINSHASA LORS DE MANIFESTATIONS ANTI-KABILA : AU MOINS 4 MORTS, AFFIRME MENDE
Quatre personnes au moins, dont
deux policiers, ont été tuées lundi 19 janvier à Kinshasa lors de violents
affrontements entre forces de l'ordre et manifestants hostiles au président
Joseph Kabila.
Les violences ont eu lieu dans
plusieurs quartiers de la capitale de la République démocratique du Congo, où
plusieurs pillages ont également été commis, alors qu'un collectif d'opposants
avait appelé la population de la ville à "occuper massivement le
Parlement" pour protester contre le projet de loi électorale en cours
d'examen.
Ce texte, qui lie la tenue des
prochaines élections présidentielle et législatives censées avoir lieu en 2016,
est susceptible d'entraîner un report de ces scrutins et de permettre à M.
Kabila, à la tête du pays depuis 2001, de se maintenir au pouvoir au-delà de la
fin de son mandat.
Selon le porte-parole du
gouvernement congolais Lambert Mende, "deux policiers ont été tués par
balles", ainsi que "deux pilleurs".
Selon une source hospitalière,
deux "manifestants" tués par balles ont été admis à la morgue de
l'Hôpital général de Kinshasa, mais l'AFP n'a pu constater elle-même ces morts,
l'accès à la morgue lui ayant été refusé par les forces de l'ordre.
Une dizaine de personnes blessées
par balles ont aussi été admises dans des hôpitaux.
Dans la matinée, les forces de
l'ordre ont ouvert le feu pour disperser un rassemblement de quelques milliers
d'étudiants près de l'université, dans le sud de Kinshasa, selon une
journaliste de l'AFP et des témoins.
Jusqu'en milieu d'après-midi, des
échauffourées ont opposé plusieurs groupes de jeunes (parfois jusqu'à 200) et
la police à coups de pierres et de gaz lacrymogènes, dans divers quartiers populaires
de la capitale, dont plusieurs axes ont été coupés par des barrages de pneus
enflammés.
N'arborant aucun symbole
politique les contestataires tenaient des propos hostiles à M. Kabila,
l’exhortant à "partir à la fin de son mandat".
Des coups de feu ont été entendus
en plusieurs endroits de la capitale, où une dizaine de voitures au moins ont
été brûlées. Plusieurs témoins ont raconté avoir assisté à des scènes de
pillages, qui semblent avoir visé principalement des magasins tenus par des
Chinois.
Dans le sud de la ville, une
église branhamiste fréquentée par un haut responsable de la police kinoise été
incendiée, selon plusieurs fidèles de cette secte dérivée du pentecôtisme.
A l'université, selon un
responsable, les étudiants ont causé quelques dégâts matériels dans le bureau
du ministre de l'Intérieur, Évariste Boshab, qui y enseigne le droit.
Très tôt, des centaines de
policiers et de soldats de la Garde républicaine (GR) avaient été déployés dans
la capitale. Toute la journée, ils ont bouclé le Parlement, empêchant tout
passage dans un large périmètre autour du Palais du peuple, incluant les sièges
de plusieurs partis politiques d'opposition.
Les violences ont eu lieu alors que
M. Kabila recevait son homologue angolais, José Edouardo dos Santos, à
l'occasion de la signature d'accords de coopération économique, mais le calme
état revenu à la tombée de la nuit.
"Démocratie confisquée"
Dans bien des endroits, la
capitale ressemblait à une ville morte : rues désertes, écoles fermées,
transports en commun absents. Nombre d'habitants et d'écoliers sont restés chez
eux.
Sur les grands axes menant au
riche quartier Gombe, où se trouvent administrations et ministères, on pouvait
voir des policiers et soldats à chaque carrefour. Le siège de la télévision
publique était gardé par des postes de GR (gardes républicains) armés de
mitrailleuses.
Ville morte, Lubumbashi, deuxième
ville du pays, dans le sud-est, l'a été également pendant une bonne partie de
la journée, selon plusieurs témoins. Un fort déploiement militaire et policier
semble y avoir dissuadé toute velléité de manifester.
Retenu à Kinshasa pendant
plusieurs heures au siège de son parti, Vital Kamerhe, président de l'Union
pour la Nation congolaise (UNC), troisième parti d'opposition au Parlement, a
qualifié le bouclage policier du Parlement de "confiscation de la
démocratie par la famille politique de M. Kabila".
Ancien président de l'Assemblée
nationale et ex-meilleur allié de M. Kabila, M. Kamerhe est aujourd'hui un de
ses opposants les plus bruyants. A Bukavu, son fief du Sud-Kivu, dans l'est du
pays, près de 200 manifestants ont manifesté en sa faveur.
A Goma, capitale du Nord-Kivu, un
correspondant de l'AFP a vu 16 opposants arrêtés pour avoir bravé
l'interdiction de manifester décrétée par le maire de la ville. La Mission de
l'ONU au Congo (Monusco) a déploré que deux de ses policiers aient été blessés
par des manifestants ayant caillassé leur voiture dans cette ville.
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